Entraînement chez Yonnet pour Maxime Solera. Entretien avec Denis Loré.

La temporada 2021 ne s’annonce pas sous les meilleurs auspices et déjà beaucoup d’arènes ont dû annuler ou repousser les spectacles taurins prévus en début de saison. Mais les professionnels, comme nombre d’entre nous, veulent rester optimistes et continuent de s’entraîner avec l’espoir que le ciel se dégage vers la fin du premier semestre.

Ainsi Maxime Solera qui continue sa préparation en vue d’une alternative prévue au mois de juin à Arles après avoir été repoussée une paire de fois à cause de la crise sanitaire. 

Nous avons pu assister à une tienta chez Yonnet et mesurer combien son toreo a évolué, gagnant en technique et en maîtrise face à quatre vaches de belle corpulence et dotées chacune, avec leur qualités et leurs défauts, d’un caractère affirmé. Une épreuve que Maxime a passé avec brio, dominant son sujet avec une certaine aisance (pour ne pas dire avec une aisance certaine) et une joie de toréer visible. Un bon entraînement pour une alternative qui on l’espère pourra cette fois avoir lieu, et si possible dans des conditions sereines.

Le novillero Fabien Castellani et le practico Christophe De Vos sont sortis de second, Jean-Loup Aillet officiait à la pique et Marc Antoine Romero à la brega.

La tienta en couleur

et en noir et blanc...

Juste avant la tienta, nous avons profité de l’occasion pour interviewer Denis Loré, nouvel apoderado et conseiller technique de Maxime. L’intention était aussi de faire de même avec Maxime et Charlotte Yonnet. Mais le couvre-feu a eu raison de notre intention. Ce sera pour une prochaine fois.

Bonjour Denis, peux-tu nous parler de cette temporada 2020 un peu spéciale, avec le Covid qui a tout changé. Comment l’avez-vous vécue ?

On va vite résumer : une novillada à Dax et une à Istres, deux novilladas inespérées car on était bien parti pour qu’il n’y ait rien. À partir de là, on a beaucoup travaillé de salon et sur certains points techniques. Tout ce qu’on a pu travailler, il l’a mis en pratique avec des toros en privé, ou lors de fiestas camperas ou de tentaderos. 

Je suis très content de l’évolution de Maxime même si la temporada a été très courte et les conditions pas très favorables. À Dax le le Pedraza a été brave au cheval mais ensuite il s’est arrêté dans la muleta. Il a manqué de race et de fond, il est parti aux tablas. Ensuite on a mal tué mais c’est un point qu’on travaille et on est en train de progresser là-dessus. La mise à mort est un point important et on doit l’améliorer. 

À Istres une novillada très intéressante avec notre lot qui s’est laissé mais qui a été un peu soso, sans transmission. On a vu un réel progrès de Maxime ce jour-là. En plus il les a bien tués tous les deux. Il n’a pas eu d’oreilles mais il a démontré des qualités. On m’a rapporté que Maxime avait beaucoup changé, beaucoup progressé. C’est le travail. Maxime est un jeune qui veut évoluer, qui est intelligent, qui a la tête sur les épaules. 

Pour 2021, on ne sait pas trop où on va, même s’il y a des dates que certaines arènes vont forcément confirmer avec les mêmes cartels qu’en 2020. Il y a aussi cette alternative prévue pour la Feria de Pâques à Arles, et que Jean-Baptiste a dû repousser au mois de juin. C’est vrai que c’est embêtant, mais comme avec la crise sanitaire, ce n’est pas possible de faire quoi que ce soit… Il faut être à l’écoute des gens d’en haut, et l’alternative il la prendra à Arles au mois de juin. Il y a d’autres dates qui vont normalement se greffer derrière, celles qu’il a depuis 2020 mais qu’il faut confirmer. On ne sait pas si ça va se faire aux dates qui étaient prévues ou si les corridas seront programmées à une date ultérieure.

Avec une alternative prévue au mois de juin, si la feria de Nîmes a lieu, et vu qu’elle se situerait avant, est-il possible d’envisager de voir Maxime toréer à Nîmes, éventuellement pour une dernière novillada piquée ?

L’alternative restera à Arles, on l’a promis à Jean-Baptiste, et une promesse est une promesse, et c’est le souhait de Maxime de la prendre à Arles. On devait la prendre en 2020 avec les Miura mais ce sera avec un autre élevage.

Et pour une dernière novillada à Nîmes ?

Je ne sais pas, et d’ailleurs on ne sait pas si la feria va se faire ou ne pas se faire. Il y a beaucoup de ferias qui repoussent leurs dates. Donc c’est un point d’interrogation. En plus, on ne sait pas s’il y aura une novillada ou pas. À l’époque il y avait plusieurs novilladas et donc la possibilité de pouvoir rentrer dans un cartel. C’est très compliqué, très délicat. Pour le moment ce n’est pas d’actualité. On se consacre à la préparation, et surtout sur l’alternative du mois de juin. Forcément il y aura une préparation intense, que ce soit au niveau des vaches ou des toros. Maxime sera préparé, ça c’est sûr. On aura du temps pour ça, mais c’est dommage que le calendrier soit retardé à cause de ce virus.

Le vrai début de la saison en public sera donc à Arles au mois de juin ?

Normalement oui. Là maintenant on va se consacrer à la préparation. Maxime doit être bien préparé pour ce jour important, car c’est une date cruciale pour l’avenir aussi.

Pas de Miura pour l’alternative. Est-ce que le cartel est avancé ?

Ce n’est pas à moi de l’annoncer. Par respect pour l’empresa, je laisse le soin à Jean-Baptiste de le faire connaître. Pour le premier cartel d’alternative (celui de 2020), je ne m’occupais pas encore de Maxime et ce n’était pas moi qui avait négocié ce contrat.

En attendant donc vous continuez la préparation. Quelles sont les points forts de Maxime et sur quoi devez-vous travailler ?

Je n’ai aucun souci avec Maxime, que ce soit quand il s’entraîne avec moi ou quand il va en Espagne. C’est un garçon qui a la tête sur les épaules, qui est centré. Il peut aussi s’entraîner sans moi avec ses banderilleros. Comme il vit à Barcelone, il passe beaucoup de temps là-bas. Quand il peut venir s’entraîner avec moi c’est très bien, mais avec le Covid, quand il y a eu le confinement, c’était très compliqué voire impossible pour s’entraîner. Il est venu quelques fois chez moi et on a travaillé sur de nombreux points. Maxime, c’est un travailleur et je suis très fier de lui. Il a mis en pratique devant des vaches et des toros tout ce que je lui avais appris, et ce qu’il faut vraiment, vraiment travailler, c’est la mise à mort. C’est là où je doute un petit peu.

Est-ce qu’il n’est pas un peu difficile justement de travailler la mise à mort quand il n’y a pas de spectacle ?

Oui bien sûr mais ça se travaille aussi au carreton et avec des toros en privé. Bien sûr le contact avec le public, c’est hyper important. Mais le privé est tout aussi important pour mettre tout ça en valeur et de le mettre ensuite en pratique devant le monde. Tout ça est délicat mais comme je le dis, on ne peut faire une longue carrière que si on tue les toros. Tu peut être un très très bon torero, si au final tu n’a pas ça, matador, tueur de toros, c’est marqué sur ta carte professionnelle, tu ne feras pas carrière. Et c’est sur ça qu’il faut travailler, travailler sans cesse. Sur beaucoup d’autres points il faut travailler aussi bien sûr, mais Maxime évolue à une vitesse grand V et je lui fais entièrement confiance. Il a des personnes importantes autour de lui, de bons professionnels qui ont tous la même idée et c’est important pour que tout aille de l’avant.

Le créneau professionnel reste le même, c’est-à-dire celui des corridas dures ?

Maxime l’a toujours dit, il est très clair là-dessus. Sa carrière sera avec ce type de corridas. Il le sait, il l’a déjà déclaré à la presse. Je ne suis pas là pour changer les choses. Je suis là pour le faire évoluer. Il y a des places à prendre. Au jour d’aujourd’hui, il n’est pas le seul. Quand tu n’as pas le choix, si tu veux continuer dans ta profession et vivre ta passion, tu devras aller dans ce type de corrida. Il était peut-être seul l’an dernier, mais cette année il ne le sera peut-être pas. Les places seront très chères, il y aura de moins en moins de courses et il va falloir se battre pour se les gagner.

Cette année, si la situation se débloque, est-ce que votre perspective c’est la France ou est-ce qu’il peut y avoir des ouvertures sur l’Espagne ?

Le problème c’est que personne ne sait où on va. En France il y a des possibilités. L’Espagne, c’est un point d’interrogation car là-bas le virus est aussi virulent que chez nous, et peut-être plus. Je ne sais vraiment pas ce qui va se passer en Espagne. Pour le moment, concentrons nous sur la France et les quelques contrats que nous avons signés, et après on verra pour le reste.

On suivra ça avec attention. Merci pour les quelques minutes que tu m’as consacrées et Suerte pour la suite..

(Entretien réalisé par Paco à La Bélugue le 27 janvier 2021).