Beaucaire. 26 juillet. Les Dolores Aguirre et Francisco Montero animent la tarde.

Pour la première novillada post-confinement célébrée dans l’hexagone, les aficionados avaient répondu présent (environ un millier de spectateurs). 

Des représentants de l’ACT Villaseca de la Sagra (Toledo) avaient fait le déplacement dans le cadre du jumelage avec l’Aficion Taurine Beaucairoise pour assister au desafio entre la ganaderia du Conde de la Corte et celle de Dolorés Aguirre.

A l’issue du paseillo (décalé de 15 minutes à cause des retardataires), les participants se figèrent pour un hommage à la devise du Conde de la Corte, qui fête ses 100 ans d’existence, et à la cavalerie Heyral créée la même année (1920).

Côté bétail, les Conde de la Corte ont affiché peu de race et distillé l’ennui sur les étagères. Les Dolorés Aguirre, quant à eux, ont été les mansos con casta qu’on connaît et ont animé la seconde partie de la course, la palme revenant au quinto qui fut honoré de la vuelta al ruedo posthume.

José Cabrera paraissait décidé à s’imposer dans les arènes Paul Laurent. Ainsi avant la sortie du premier se positionna-t-il de rodillas face au toril pour une réception a porta gayola. L’utrero, abanto de salida comme ses frères, ne permit qu’un capeo de fixation avant de prendre deux rations de fer d’intensité dégressive en poussotant sur la corne gauche. Guère plus d’entrain au second tiers mené tant bien que mal par Cabrera qui doubla le violin final faute de réussite au premier assaut. Muleta en mains, le novillero d’Almeria se montra prudent dans les doblones d’ouverture, puis laborieux sur les deux bords par la suite, laissant çà et là quelques muletazos honorables sans plus. Trois-quart contraire assortis d’un brelan de descabellos pour mettre fin au débat. Silence.

Face au pupille de Doña Dolorés, le garçon dessina quelques capotazos inégaux avant de présenter l’animal au lancier de service pour une première ration de fer prise en poussant, l’utrero mettant les reins pour soulever un peu la pièce montée. Suivirent deux rencontres moins appuyées dont le cornu sortit seul à chaque fois. Cabrera assura cette fois encore le second tiers par deux poder a poder et un violin de correcte exécution. Bien doublé, le cornu resta vif dans la muleta du garçon qui peu à peu lui laissa l’initiative du combat. Faute d’être dominé, l’Aguirre compliqua la tâche du novillero lors de la suerte suprême où il fut long à cadrer. Quatre tentatives sans s’engager, frôlant la cornada contre les planches lors du quatrième assaut, puis une entière en place à la limite du troisième avis grâce à la bienveillance du palco. Arrastre applaudi et silence pour le piéton. 

Francisco Montero était venu pour triompher. Il a failli y arriver, mais trahi par l’épée lors de son second combat, il a quitté l’arène par ses propres moyens. 

Le second Conde de la Corte visita lui aussi le ruedo avant de s’engager dans le capote du garçon pour une larga cambiada afarolada de rodillas près des planches immédiatement suivie d’un capeo de fixation vers le centre s’achevant par deux véroniques et une demie. Mansote face à la cavalerie, l’utrero mit un peu d’énergie dans la première rencontre, retournant ensuite dans le matelas pour trois piqûres sans conviction. Il montra toutefois plus d’entrain lors du second tiers où il accompagna les banderilleros jusqu’aux planches. Après brindis au ciel, Francisco Montero signa quelques muletazos au centre avant de trouver la bonne distance pour composer une faena ambidextre de correcte facture durant laquelle il dut retenir un adversaire qui ne se fixait guère dans l’étoffe. Plus volontaire que techniquement abouti, le trasteo fut crédité d’un pavillon après une lame contraire efficace.

C’est par une larga cambiada a porta gayola servie avec la cape de paseo qu’il reçut le Dolorés Aguirre sorti en quatrième position, poursuivant ensuite toujours avec ce capote par véroniques et demie. Vint ensuite ce qui constitua le meilleur moment de cette course.  Une première pique prise avec beaucoup d’alegria, le bicho poussa le cheval en galopant contre le peto jusqu’à obtenir la chute de l’équidé promené sur une vingtaine de mètres. Ovation. Remis en suerte, l’Aguirre renouvela sa charge dans les mêmes conditions, les planches stoppant la poussée. Nouvelle ovation. Placé au centre, le novillo repartit une fois de plus, sortant seul cette fois après un picotazo (Montero avait demandé à son picador un regaton mais au dernier moment le uhlan retourna sagement la pique pour présenter le fer). Le public fit logiquement saluer le picador lors de sa sortie tandis que Montero se précipitait pour un abrazo mérité. J’engloberais le cheval dans cette hommage. Au second tiers, le garçon laissa ses banderilleros poser les deux premières paires avant d’assurer lui même la troisième clouée en poder a poder. Débutée de rodillas par passes hautes, la faena ambidextre connaîtra ses meilleurs moments sur la main gauche, Montero toréant avec beaucoup d’entrega mais de façon un peu brusque à mon goût. Il y avait matière à plus de douceur, mais on ne saurait reprocher au garçon de manier la muleta avec son coeur. Final par bernadinas (certaines serrées),  puis trois pinchazos avant entière contraire qui limitèrent la récompense à une vuelta alors qu’une, voire deux oreilles, semblaient acquises. Vuelta aussi pour le novillo auteur d’un important premier tiers, avec le bémol de la troisième rencontre. Une quatrième rencontre aurait peut-être permis d’affiner notre jugement sur l’animal.

José Antonio Valencia, encore un peu vert pour ce genre de confrontation, n’a pas été favorisé par le sorteo. Son premier adversaire, de La Corte, était un animal aux cornes astifinas et de forces justes. Lui aussi visita la piste en prenant quelques capotazos sur le voyage, donnant déjà quelques signes de faiblesse. Suivirent une première ration de fer prise de près puis une seconde sans (pouvoir) pousser. Deux bonnes paires (propres) de Marc Antoine Romero au second tiers. Prudent dans le maniement de la muleta, le jeune vénézuélien signa quelques muletazos honorables sur les deux bords, se tenant à distance respectueuse d’un utrero qui raccourcissait progressivement ses charges et jouait des pitons. Le desplante dans ces conditions était superflu. Deux-tiers percuecera (dans le cou) basse et hémorragique pour le final. Silence.

Le sixième était le manso le plus affirmé de la tarde. RAS au capote puis trois essais face à la cavalerie, le bicho fuyant à chaque fois. Le picador se rapprocha du toril et l’Aguirre chargea, levant un peu le cheval avant de prendre à nouveau la suite. Nouvel essai infructueux avant une nouvelle charge violente avec brusque poussée suivie de deux brèves rencontres. Picador applaudi et excellent comportement du cheval qui aguanta les violentes embestidas de l’Aguirre. Second tiers pas très abouti avant faena du même tonneau, le bicho finissant cul aux planches et ne permettant pas grand chose (sûrement trop châtié). Entière latérale après pinchazo. Silence.

Le palmarès de la course fut le suivant :

  • Meilleure ganaderia : Dolorés Aguirre.
  • Meilleur novillero : Francisco Montero.
  • Meilleurs picadors : ex-aequi Adrien Navarette « Niño de Malaga », de la cuadrilla de Francisco Montero, qui a piqué le 5° et Jean-Loup Aillet, de la cuadrilla de José Antonio Valencia, qui a piqué le 6°.
  • Meilleur banderillero : desierto.
Les prix ont été remis en piste à l’issue de la novillada.
Conde-de-la-Corte

Beaucaire. 26 juillet 2020.

Durée de la course : 3h10. Temps chaud.

Novillos de Conde de la Corte (1°, 2° et 3°) et de Dolorés Aguirre (4°, 5° et 6°). Vuelta pour le 5°.

  • José Cabrera : silence et silence
  • Francisco Montero : oreille et vuelta.
  • José Antonio Valencia : silence et silence.
Dolores-Aguirre

Notes.

  • Certains toreros portaient un ruban noir au bras, très probablement en hommage aux victimes du Covid-19.
  • Bonne prestation de la cavalerie Heyral.
  • Bonne prestation du palco dirigé par Bernard Cisset.
  • Enhorabuena aux organisateurs qui, malgré les contraintes financières et sanitaires, ont tenu à proposer cette course aux aficionados.

Reseña et photos : Patrick Colléoni « Paco ».