Istres. 17 juin (tarde). Parodie pour le final.

Après les Jandilla du matin, place aux toros de Juan Pedro Domecq qui sont à la tauromachie ce que le ver est au fruit.

Autant dire que le bétail proposé lors de cette tarde, plus charpenté que celui du matin, mais d’armures plus que commodes et vides de contenu, fut la négation des lettres de noblesse de la corrida. Un public festif qui demandait des trophées à tort et à travers, un palco sans critères prêt à toutes les compromissions pour faire briller artificiellement la course, le décor était planté.

Enrique Ponce, après le paseillo, reçut un souvenir en guise de remerciement pour sa présence à Istres, notamment le vendredi face aux toros d’Adolfo Martin.

Dans son jardin, Enrique Ponce reçut son premier « adversaire » par véroniques, le fixant au centre par demie. Une pique trasera puis un picotazo conclurent le premier tiers avant un quite du roi Henri par véroniques et revolera. Faenita ambidextre agréable du Maestro de Chiva qui soigna son Juan Pedro pour ne pas qu’il aille au sol, le tout sur l’air du Concerto d’Aranjuez. Entière caida pour la note finale et première oreille de la tarde.

Après quelques véroniques et deux piqûres, Ponce signa un quite par véroniques et demie avant de s’engager dans une seconde faena ambidextre agréable mais souffrant d’un manque d’opposition. L’Avé Maria chanté par la soprano, puis la musique du film « Jeux interdits » accompagnèrent l’exhibition de Ponce, toujours parfait dans son rôle d’élégant infirmier. Que reprocher au garçon ? Son toreo est parfait, millimétré, esthétique… Mais où est donc le toro censé incarner le combat ? Entière caida. Deux oreilles, pourquoi pas, au point où on en est, on n’est pas à ça près !

Juan Bautista est lui aussi à Istres dans son jardin. On l’y voit sûr de lui, détendu, en pleine confiance. Ainsi il reçut le second par quelques véroniques pieds joints et demie, puis après la piquette d’usage, signa un quite par chicuelinas et demie. La faena ambidextre, parfaitement maîtrisée, orchestrée sur l’air de Mission, eut beaucoup d’impact sur un public conquis d’avance, le toro se prêtant avec beaucoup de servilité aux demandes du torero. Après un recibir raté, l’arlésien logea une entière caidita a recibir à nouveau. Un, puis deux, puis trois mouchoirs apparurent au palco, lequel en sortit un quatrième de couleur bleue pour honorer un bicho si peu piqué. Un peu de sérieux, Messieurs, il en va de la crédibilité de la fonction et de la plaza. Vous avez mis Istres au rang d’une station balnéaire.

Face au quinto, après quelques véroniques en terrain réduit et demie, puis la monopique d’usage, quite de Juan Bautista par navarras et demie. A la demande des gradins, Jean-Baptiste banderilla plutôt bien son adversaire avant de composer une faena de bonne facture, sur l’air de « The sound of silence », un trasteo qui aurait pu lui valoir un trophée si la mort avait été plus rapide. Pinchazo, tiers de lame, descabello. Salut.

Ginés Marin fut le moins bien servi au sorteo. Il s’appliqua pourtant face à ses deux opposants mais la mayonnaise ne prit pas. Joli jeu de cape face au troisième, bien sûr monopiqué, puis un joli quite à l’identique. Hélas la fadeur de l’opposition fit que la faena ambidextre ne décolla jamais. Entière tendida au troisième assaut. Silence.

Le sixième fut changé pour une incapacité physique pas si évidente que cela (à ce compte-là on aurait pu changer les six) et remplacé par un sobrero de Parladé (second fer de JPD) de format réduit.  Hélas, très vite le remplaçant (monopiqué lui aussi) s’éteint, rendant impossible toute remise de copie acceptable. Le garçon s’appliqua, il fut propre, un peu long, mais à l’impossible nul n’est tenu. Demi-lame, descabello et nouveau silence. 

Sortie a hombros pour Enrique Ponce et Juan Bautista à l’issue d’une tarde sans toros qui vous fait douter de votre passion. Si l’avenir de la corrida est la parodie à laquelle nous avons assisté, nul doute que l’échéance viendra à court terme.

Arènes décorées par Yoan Clément Morcillo.
Minute de silence à l’issue du paseillo à la mémoire d’Ivan Fandiño tragiquement disparu un an plus tôt.

Reseña et photos : Paco. Vidéo : Romain Bofi.