Première corrida de la Feria Pascale avec des toros d’El Freixo, propriété d’El Juli qui avait ce jour la double casquette de ganadero et de chef de lidia.
L’accompagnaient au paseo Juan Bautista et le jeune matador péruvien Andrés Roca Rey.
Une ambiance toute particulière pour ce spectacle avec le décès récent de Luc Jalabert, ancien directeur de l’arène et père de Juan Bautista, dont les obsèques avaient été célébrées la veille et dont l’ombre planait sur l’amphithéâtre.
Une minute de silence fut observée à sa mémoire à l’issue du paseillo avant que le public ne témoigne son affection à Jean-Baptiste en l’appelant à saluer avant le début des débats.
Une course à deux vitesse avec d’un côté un torero bien décidé à triompher pour rendre hommage à son père disparu, et un bétail bien présenté d’origine Daniel Ruiz et Garcigrande dans la pure ligne commerciale prisée par les figuras, à savoir fade, doté de forces très justes et collaborateur quand le physique le permettait. El Juli lui même en fit les frais. Seul le sixième se montra à la hauteur de ce qu’on est en droit d’attendre d’un vrai toro de combat.
De plus le vent s’invita aux débats, et seul Juan Bautista bénéficia d’accalmies lors de ses deux combats. Et c’est tant mieux car il eut été dommage en ce jour si particulier qu’il ne puisse aller au bout de ses intentions. Quatre oreilles pour l’arlésien qui, on le comprend, refusa la sortie a hombros. Jean-Baptiste ne pouvait rendre meilleur hommage à son père.
El Juli, gêné par les rafales, eut du mal à domestiquer son capote pour recevoir son premier adversaire qui fut épargné au cheval en deux rations « light ». Brindée à Juan Bautista, la première faena du madrilène, instrumentée à mi-hauteur sur les deux bords, fut certes très technique mais d’un intérêt très relatif à cause du peu de présence de l’animal. Pinchazo en prenant les boulevards puis « julipié » (estocade maison portée en sautant après avoir contourné la corne). Descabello et sifflets à l’arrastre. Silence pour le torero.
Quelques véroniques pieds joints et revolera pour accueillir le fade quatrième qui fut aussi peu châtié que le premier en deux courtes rations de fer entrecoupées d’un quite du titulaire par chicuelinas et demie, Juan Bautista intervenant ensuite par faroles et revolera. A nouveau gêné par le vent, Julian composa quelques séquences droitières de correcte facture, le passage à gauche s’avérant moins convainquant. Entière delantera caidita pour en finir, porté avec toujours aussi peu d’engagement, et même tarif que pour le premier.
Juan Bautista reçut le second par un cocktail véroniques-delantales-chicuelinas et demie avant deux courts puyazos bien dosés par Alberto Sandoval, très propre dans son oficio. Quite de Juan Bautista par delantales et revolera, puis échauffement de Roca Rey par chicuelinas serrées et demie. Brindée au ciel, la première faena fut variée, dominatrice et élégante, l’arlésien baissant bien la main quand il le pouvait, signant une belle partition malgré quelques derrotes de l’animal. Long final encimista avec une pointe de tremendisme assez inédite chez le torero jusqu’à ce jour. Grande estocade foudroyante dans tout le haut et deux oreilles pour Juan Bautista.
Le quinto fut accueilli par largas de rodillas, Jean-Baptiste maintenant la position pour quelques véroniques avant de se relever pour encore des véroniques suivies de chicuelinas, l’ensemble rématé par une revolera. Mise en suerte par crinolinas pour deux rations de fer de régime, la seconde symbolique. Seconde faena du garçon à nouveau sans les rafales, et un second trasteo à l’identique du premier malgré un bicho qui sautillait sur place par manque de forces et qu’il fallut souvent obliger. Bon travail du maestro qui acheva à nouveau par une séquence encimista suivie par des tenttives de mise à mort a recibir qui ne s’imposaient pas, vu le manque de charge du Freixo. Entière caidita pour en finir et à nouveau deux oreilles.
Andrés Roca Rey est, on peut le dire, passé presque inaperçu ce jour, surtout lors de son premier combat. Gêné par le vent, il fut inédit au capote, puis après les deux piques (light) règlementaires, il entama sa première faena en frôlant l’accrochage, le cornu lui venant carrément dessus lors du premier muletazo cité de loin. C’est sur la corne droite que se déroula l’essentiel du travail, le bicho s’avérant plus court à gauche. Quelques séquences de bonne facture dans un ensemble de peu de transmission. Estocade rinconera et trois descabellos pour en finir. Silence.
Le sixième fut le seul à pouvoir prétendre légitimement à l’appellation de toro de combat. Après quelques véroniques, chicuelinas et revolera, il fut le seul à pousser sous la première pique, revenant ensuite vers le lancier pour un second puyazo moins appuyé. Muleta en main, le jeune péruvien sut peu à peu mettre l’animal dans sa muleta, domptant ses charges vives en lui donnant la bonne distance, sans trop l’obliger et en le laissant respirer. Un bon boulot, technique faute d’avoir le brio attendu. Quasi-entière en place pour la conclusion. Silence après une faena pour public averti.
On retiendra de cette course l’image émouvante de Jean-Baptiste faisant la vuelta en compagnie de ses enfants, puis le salut au ciel de la famille.
Reseña et photos : Paco.