Cette année, le Salon du Cheval Camargue était endeuillé.
Le mas de la Cure est triste, la maison voisine pleure. Florence nous a quittés.
Florence Clauzel aimait sa terre, sa culture, ses traditions… Elle avait eu le mal du pays. Si Paris lui avait apporté le confort, l’essentiel lui manquait. A chaque occasion, elle s’y replongeait et à chaque séparation, c’est en pleurs que se faisait le retour vers la capitale.
Elle décida, un jour, pas si lointain, de troquer les talons aiguilles et les tailleurs Chanel pour les bottes de cheval et les pantalons en peau de taupe. Revenue au Pays, des illusions plein la tête, elle avait apporté sérieux et courage. Amour et passion la guidaient dans sa quête…
La Bouvine lui doit beaucoup, Hadrien Poujol ne se privera pas de le souligner… La nouvelle était tombée : Florence nous a quittés.
Nous sommes encore tous sous le choc de ce drame qui plonge une famille dans le deuil et le chagrin. Ses amis ne sont pas épargnés, la douleur est immense, à la mesure de la perte.
Les images tournent en boucle dans ma tête : je la revois sur la scène à Méjanes, en juillet dernier, lors de la remise de médailles. Michèle Ricard l’avait honorée parmi une dizaine de femmes de Camargue méritantes et talentueuses. Elle se trouva être à mes côtés, je représentais Martine, ma compagne. Nous avons échangé quelques mots.
Quelle tristesse !…Tant de courage, d’élégance, de force, de détermination….et puis ce geste terrible définitif, funeste. La Camargue pleure….
Camagri, ce matin là, était vêtu de crêpe, voile triste, sombre qui recouvre les douleurs les plus profondes. La souffrance était palpable chez tout un chacun, le cœur n’y était pas. Les petits chevaux blancs s’étaient habillés de gris. Tristes, ils semblaient porter la douleur de la Camargue toute entière. Les chuchotements, ça et là, évoquant à voix basse, le drame : Florence nous a quittés.
Les hennissements semblaient complaintes, le chant des oiseaux était lugubre….Tamaris gémissants et roseaux ployés, encore engourdis par l’hiver complétaient ce morne tableau. Quelques tâches noires regroupées en troupeau se prêtaient aux exigences des gardians….. La Camargue était belle dans sa souffrance et sa douleur.
Le dimanche, le mistral se leva, la tristesse se dilua quelque peu, les nuages se dissipèrent…. Animations et concours suivirent leur cours. La vie continue, même orpheline la Camargue n’y échappe pas !
Tri, maniabilité, qualification loisir, modèles et allures, attelages, parcours de pays, chevaux à la vente……Toutes ces disciplines dans lesquelles ce cheval excelle. Le moment des récompenses venu, on attribua le prix François André, le Prix Fanfone Guillerme, le trophée Crin Blanc….. On n’arrête pas l’histoire… Il y a bientôt un demi-siècle que les premiers étalons de Race Camargue étaient reconnus.
La fête, même embuée, se devait d’êtr,e et elle fut.
Mais déjà, à l’ouest, le soleil montrait des signes de faiblesse, il s’éloigna jusqu’à disparaître à l’horizon. Le rideau tomba, le Salon ferma ses portes.
Texte : Freddy Porte. Photos (sauf portrait) : Martine Clément.