Troisième corrida de feria, ciel nuageux, température presque fraîche, deux heures trente de spectacle.
Six toros de La Quinta, parfaitement présentés, sous le signe du Santa Coloma, très bien armés. Tous deux piques prises avec une belle bravoure, encastés pour la plupart, vuelta au quatrième, le cinquième applaudi à son entrée.
- Juan Bautista (paille et or), au premier, un pinchazo et une entière à recibir, une oreille ; au quatrième, une entière à recibir, deux oreilles et la queue, vuelta au toro.
- David Mora (vert pâle et or), au deuxième, une entière, vuelta ; au cinquième, un pinchazo, une entière, une oreille.
- Juan del Alamo (bleu marine et or), au troisième, une entière, silence ; au dernier, une demi-lame, sept descabellos, avis, silence.
Cette corrida était aussi un hommage à la mémoire de Ivan Fandiño et les trois toreros brindérent au ciel leur premier adversaire. La musique jouait une sonnerie au mort, le public applaudit pendant une minute avant que ne soit interprété le paso « Ivan Fandiño ».
A l’issue du paseo il y avait une ambiance quelque peu pesante… La mémoire d’Ivan Fandiño, chaque fois ravivée par le brindis des trois acteurs, rappelait le grand torero qu’il avait été dans ces arènes. Sans l’accident d’Aire-sur-l’Adour, il aurait dû être présent à ce cartel. Il fallait savoir refouler son émotion. Juan del Alamo n’y est peut être pas parvenu, ce qui explique son jeu assez morne.
Après la fadeur de la veille, on parlera encore longtemps à Mont-de-Marsan, de cette course, un succès majeur avec un extraordinaire lot de La Quinta, Juan Bautista qui sort en triomphe avec Francisco Mosle, mayoral. Le torero a rencontré l’adversaire idéal et la légende s’est écrite sur le sable, passe après passe. L’arlésien a vécu ce moment extraordinaire avec « Palomito » qui présentait toutes les qualités du La Quinta. A l’issue d’un premier tercio parfait, il revenait à la cape pour deux ou trois quites qui soulevaient l’enthousiasme du public… Vinrent ensuite des naturelles majestueuses, comme personne ne pense que ce soit possible. Juan Bautista mélangeait le classique et la pureté. Un corps relâché, une muleta mystérieuse, tout cela ressemblait à de la magie et suggérait plus qu’il ne commandait au toro. On ressentait une maîtrise totale, sur tous les éléments.
Il fallait un point d’orgue pour terminer, il le trouva avec une immense épée à recibir qui foudroya littéralement l’animal. Ce fut du délire, la foule scandait « torero… torero… ». Les deux oreilles et la queue tombaient du palco et « Palomino » honoré d’une vuelta posthume. Au cours de son tour d’honneur, Juan Bautista appela Francisco Mosle à venir saluer avec lui. Un torero avait trouvé l’idéal élevé par un homme du campo. Bautista venait de gagner là le remplacement de Roca Rey pour le lendemain.
Mais l’arlésien était en très grande forme, il avait ouvert la corrida par une excellente faena où, par ses naturelles lentes et profondes, il avait ensorcelé son adversaire. En cette journée tout semblait lui réussir. Bautista paraissait sur un nuage, celui du bonheur et de la réussite. Dans quelques heures sa confrontation avec Castella promet un très grand moment.
Pour David Mora, et les deux fois, il ne fut pas facile de succéder au français. Mais chaque fois il fut très sûr de lui, interprétant un toreo calme, templé et très rythmé. Par instant, il se payait le luxe de citer à mi-distance, donnant ainsi de l’ampleur à l’animal. Mais à être trop confiant, il fut sérieusement bousculé… Une nouvelle fois avisé, sa faena perdra beaucoup d’intérêt. En rajoutant un beau répertoire de cape, il revint avec un registre identique, s’appliquant à tout donner sur la main gauche. Il était face à un toro de rêve, sur rail, un carreton, ajoutera un mayoral. Il nous fit une dernière frayeur lors de la mise à mort où il fut une nouvelle fois pris et secoué.
Juan del Alamo est resté un peu terne, comme s’il s’excusait d’être dans ce cartel du souvenir. Il s’est battu avec ardeur avec son premier La Quinta, pas vraiment commode. Il fut souvent en-dessous de l’animal. Avisé plusieurs fois, puis bousculé. Il aura la même volonté pour terminer, mais échouera complètement à la mise à mort.
Un immense lot de toros aura marqué ce troisième temps de La Madeleine.
Reseña et photos : Jean-Michel Dussol.
Diaporama : Romain Tastet.
Vidéo : Alain Garres.