Arène bien remplie, restaient quelques places au soleil, nuage et soleil, température agréable, Deux heures vingt de spectacle.
Six novillos de l’Astarac, hauts et lourds, très mobiles, armés sans excès.
- Alejandro Adame (blanc et argent) au premier, une entière basse, salut ; au quatrième, un pinchazo, une entière, une oreille.
- Manuel Diosleguarde (vert foncé et or) au deuxième, une entière, deux descabellos, avis, salut ; au cinquième, une entière, trois descabellos, silence.
- Dorian Canton (vert et or) au troisième, deux entières, trois pinchazos, deux descabellos, silence ; au dernier, un pinchazo, une entière, un descabello, une oreille.
Alejandro Adame, le dernier des trois frères nous a-t-il certifié, est arrivé au printemps d’Aguascalientes avec la solide envie de bouffer les taurins du vieux continent. Il a manifesté cette envie de furieuse manière, vendredi à Plaisance-du-Gers, face à des novillos de l’Astarac (Guardiola) de Jean-Louis Darré, l’élevage historique de la ganaderia de Bars (32). Son tort, c’est son indolence naturelle, très latino-américaine qui a fait qu’il a combattu son premier adversaire, «Bandolero», avec une certaine insouciance. Même s’il est toujours difficile d’ouvrir une course, et malgré son grand tercio de cape et une perfection totale sur les deux mains lorsqu’il saisit la muleta, il n’est pas parvenu à faire craquer public et présidence. Mais il eut vite fait de méditer les leçons de ce demi-échec. Il revint en piste nettement plus volontaire, avec un premier tercio de cape à la mexicaine, fleuri et spectaculaire… puis prenant les banderille avec deux grands poder à poder et un violin, il venait de conquérir le public. Il lui restait à se laisser porter, non, inspirer, par son talent et son style. Il nous gratifia de deux ou trois séries sur la main gauche d’où émanait la douceur, le rythme et un temple parfait. On atteignait les sommets de la tauromachie… «Ilusion», comme le nom du toro. Non, il y avait derrière ce petit bonhomme, le dernier de la lignée, un art et une technique qui rapidement le hisseront au niveau des plus grands… Une oreille spontanément demandée par le public. Il est sûrement trop tôt pour dire que le nouvel Adame est arrivé… Mais il a toutes les qualités nécessaires.
Manuel Diosleguarde est parvenu à nous faire croire qu’il était un grand classique. Une gestuelle très épurée, des passes données avec un certain relâchement du corps, donnant toujours l’impression d’une domination parfaite. Mais cela n’a pas duré. On a vite découvert avec une certaine déception un torero très précautionneux, certes agréable à la cape mais qui fut par la suite d’une prudence extrême, se contentant du voyage de l’animal pour dessiner quelques passes. Dès que son second eral a démontré un peu plus d’agressivité, le garçon n’a pas su imposer sa loi. Il s’est fait souvent promener, retombant dans son défaut essentiel de présenter la muleta pour un semblant de figure. Pas grand-chose, sinon rien à retenir de celui qui devait sa place à sa victoire dans le Bolsin de Bougue dans les premiers jours de mai.
Dorian Canton était au contraire beaucoup plus séduisant. Il connaît tout ou presque, de la cape. Peu aidé par un premier adversaire aux tendances faibles, il chiffonnera avec la muleta qu’il sait tout parfaitement. Surtout qu’il ne se laissa pas griser par sa dernière oreille, tout de même très généreuse. Dorian Canton est un torero qui doit encore mûrir. Il y a à peine trois mois qu’il a fait sa première novillada. Certes il domine parfaitement son art. Mais il lui reste à le faire vivre, à lui donner de la profondeur et du sentiment. Avec un peu plus de réussite à la mise à mort qu’il doit encore travailler, il ne tardera pas à triompher. Dorian Canton est assurément une très belle promesse pour la tauromachie du Sud-Ouest.
On retiendra une novillada agréable où les six Astarac, de Jean-Louis Darré, toujours lourds, imposants et mobiles, sans excès de corne, ont été des adversaires parfois compliqués, mais surtout très exigeants. Il convenait de se livrer et d’aller jusqu’au bout du combat. Un lot qui aura appris à ces trois jeunes qu’il faut savoir répondre aux exigences de la tauromachie.
Reseña et photos : Jean-Michel Dussol.