Dans son poème Expiation, Victor Hugo, parlant de Waterloo, disait « Waterloo ! Waterloo ! Waterloo ! Morne plaine ! » L’aficionado en pèlerinage à Saint Martin de Crau hier aurait pu en dire autant, tant la platitude de la course pouvait s’apparenter à cette morne plaine de Waterloo où la défaite avait fait sa place.
Sur le sable de la Crau l’ennui s’installa très vite, à cause d’un lot de toros, irréprochable de présentation, mais qui fut loin d’avoir les moyens de ses ambitions. On sentit que tous voulaient mais aucun ne put. Grosse déception donc pour les frères Gallon qui auraient certainement espéré mieux, mais aussi pour tous ceux qui savent combien ils s’investissent dans leur passion. « Otra vez sera ! » comme disent nos amis espagnols.
Six toros donc des frères Gallon, de 495 à 540 kg, tous dans le type de la maison, remarquablement présentés et armés.
Morenito de Aranda est un peu le torero de la casa, surtout depuis qu’il indulta le toro « Odalisco » à Iniesta voici deux ans. On comprendra donc qu’il s’appliqua à mettre en valeur ses deux adversaires du jour. Accueilli par correctes véroniques et demie, le bicho d’ouverture prit deux rations de fer, symbolique la seconde, avant de s’avérer noblissime mais soso dans la muleta de l’espagnol qui composa une agréable faenita ambidextre, douce et templée, qui aurait pu avoir plus de répercussion si une pointe d’alegria avait animé le Gallon. Entière caida au second assaut. Silence.
Le quatrième fut élégamment reçu par jolies véroniques avant de rencontrer le lancier qui le châtia (un peu trop) en carioca à la première rencontre, la seconde à nouveau symbolique. Brindée à son banderillero, Andrés Revuelta, la seconde faena du natif d’Aranda de Duero fut de moindre liaison que la première, hachée qu’elle fut par quelques génuflexions de l’animal. Demi-lame, pinchazo, entière contraire tendida complétée par un descabello. Nouveau silence.
Juan Leal s’illustra au capote lors de la réception du deuxième par véroniques, chicuelina et revolera avant de présenter son adversaire au picador pour deux piques, traserita la première, correcte la suivante. Après un quite de Francisco José Espada par tafalleras et revolera, Marco Leal fut applaudi aux banderilles, surtout pour la seconde paire, la première plantée après avoir passé le guichet. Brindée à Cédric Bernardi, président du club organisateur de la course, la faena du français, initiée de rodillas face à un bicho débordant de noblesse, fut volontaire et son côté tremendista eut pour effet de réveiller un peu les gradins. Mais un mauvais usage des aciers priva l’arlésien d’un possible trophée. Palmas.
Les véroniques d’accueil du sixième furent un peu accrochées avant une première rencontre où le Gallon s’employa un peu, la seconde se réduisant au picotazo d’usage. Débutée sur la corne droite, la seconde faena de Leal fut plus brouillonne face à un adversaire vidé de toute substance. C’est à nouveau dans les terrains de proximité qu’il alla voler les derniers muletazos avant à nouveau des longueurs avec la rapière. Trois assauts pour une entière en place complétée par un descabello. Silence.
Qui se souviendra du passage de Francisco José Espada ? Quelques véroniques pour accueillir un troisième qui se mit très vite à boîter mais qui fut malgré tout maintenu en piste. Deux piques version light, puis des muletazos ambidextres dessinés avec application entre quelques génuflexions d’un animal sans la moindre transmission. Metisaca latéral suivi d’un bajonazo, quatre descabellos. Silence.
RAS au capote face au dernier qui fut présenté au cheval sans réelle mise en suerte pour une courte ration de fer, et second passage par le uhlan à l’identique. Après trois derechazos, le Gallon se cassa la patte avant droite au niveau du sabot. Espada poursuivit malgré les protestations du public avant de se résigner à prendre l’épée de mort. A nouveau des longueurs lors de la mise à mort et quelques sifflets pour conclure cette morne tarde.
Ciel nuageux, vent froid, demi-entrée.
Reseña et photos : Paco.