A l’occasion de la Fiesta Campera de la Peña Tibo Garcia, rencontre avec le novillero Tibo Garcia et son apoderado Serge Almeras.
torobravo : tes impressions sur ta prestation qui vient de s’achever ?
Tibo Garcia : la vache est sortie noble au capote et j’ai pensé qu’elle allait « se laisser » mais elle a fini mansa et en querencia. C’est devenu alors plus compliqué mais ça m’a permis de travailler et de faire de bonnes choses. Ensuite est sorti le novillo qui avait presque quatre ans et j’ai senti l’expression d’un toro, le comportement d’un toro. J’ai pris énormément de plaisir avec et j’ai pu sortir ce que j’avais au fond de moi et vraiment me régaler comme je le souhaitais.
torobravo : on a vu ce matin que tu étais prêt à affronter cette nouvelle temporada qui commence pour toi le week-end prochain à Samadet. Comment s’est passée ta préparation ?
Tibo Garcia : je suis parti en Espagne du 1er décembre jusqu’à fin février. Je me suis préparé avec des professionnels espagnols, José Ignacio Ramos et Mariano Jimenez (les apoderados de Juan Bautista), à San Martin de Valdeiglesias (NdR : près de Madrid). J’ai pu ainsi travailler beaucoup de choses et notamment la technique mais aussi la préparation physique et mentale. Ça m’a préparé à 200 % pour arriver « prêt à tout casser » entre guillemets.
torobravo : tu as toréé du bétail aussi ?
Tibo Garcia : non, quasiment que de l’entrainement physique et mental. On a tienté une fois au début, mais ensuite ce n’était pas la bonne période.
torobravo : tu es resté au même endroit ?
Tibo Garcia : oui, j’ai passé trois mois à San Martin.
torobravo : tu as eu aussi l’occasion de tuer en privé dans l’hiver ?
Tibo Garcia : aujourd’hui c’est mon troisième novillo. J’en ai tué un fin février, un hier et un aujourd’hui. J’ai dû tienter aussi trois ou quatre vaches. J’ai eu un très bon entrainement ce week-end. J’ai commencé vendredi et avec ma cuadrilla on a bien vu l’évolution en trois jours. On a énormément travaillé, tout n’a pas été parfait mais je suis arrivé à sortir quelque chose que je voulais sortir depuis très longtemps.
torobravo : comment sera composée ta cuadrilla cette saison ?
Tibo Garcia : on a pas mal changé depuis l’an dernier. Il reste le Santo et Gabin qu’on avait pris quelques fois l’an dernier. Le second lidiando sera Agustin Serrano et le troisième Javier Pascual. Le second picador sera Luciano Briceño qui torée souvent avec Cayetano.
torobravo : quels enseignements tires-tu de la temporada 2016 ?
Tibo Garcia : on peut tirer beaucoup de leçons de 2016. On en a parlé avec Serge. Il me manquait ce petit déclic que j’ai pu montrer aujourd’hui. On a eu de tout l’an dernier, du compliqué et du plus facile. Mais je savais qu’il fallait qu’il y ait ce déclic pour cette année qui va être importante pour ma carrière. Il va falloir qu’il se passe quelque chose.
torobravo : ton meilleur et ton pire souvenir de 2016 ?
Tibo Garcia : beaucoup de bons souvenirs, et pour commencer Samadet pour mes débuts en piquée. Puis Nîmes en fin d’année, Nîmes qui est une arène importante, magique, où j’aurais aimé couper un peu plus. Mais ça reste un très bon souvenir. La novillada pour moi la plus compliquée a été celle de Boujan avec les Escolar Gil. C’était ma quatrième novillada et je n’avais pas la technique pour affronter ce genre de bétail.
torobravo : comment envisages-tu la saison qui commence ?
Tibo Garcia : cette année, comme l’an dernier, on va aller un peu partout, on va accepter des élevages un peu plus compliqués, qui demandent un peu plus de technique. Après une première année en piquée, la technique je l’ai et donc j’arriverai plus serein pour ce genre de rendez-vous.
torobravo : tu retrouveras au moins trois fois Adrien et Andy. Quels sont vos rapports ?
Tibo Garcia : des rapports tout à fait normaux. On s’entend bien mais pas plus.
torobravo : est-ce qu’une véritable competencia s’est installée entre vous ?
Tibo Garcia : oui bien sûr. En piste je me dis qu’il faut y aller et ne pas faire de cadeaux.
torobravo : un objectif particulier pour cette saison ?
Tibo Garcia : on va essayer de toréer un maximum de novilladas, entrer dans les grandes ferias et mettre aussi les pieds en Espagne. A moi de triompher le plus souvent possible pour que les portes s’ouvrent.
torobravo : il existe pas mal de ferias de novilladas : Algemesi, Calasparra, Arnedo … Avez-vous des contacts ?
Tibo Garcia : oui, Serge a des contacts. Il devrait y avoir de quoi faire en Espagne.
Serge Alméras : l’objectif est de toréer plus que l’an passé. On a refusé d’aller à certains endroits parce que j’estimais qu’il n’était pas prêt pour ce genre de rendez-vous. Cette année il va l’être. Je suis en pourparlers avec des arènes qui proposent des novillos plus sérieux et plus compliqués. On veut surtout ouvrir les portes de l’Espagne. On n’a pas pu le faire l’an dernier et cette année c’est un objectif primordial. L’évolution de Tibo en trois jours a été énorme. Je suis un apoderado heureux parce que tout ce dont on a parlé l’an dernier et en début de saison, plus son séjour en Espagne, tout cela est en train de porter ses fruits. Il l’a montré aujourd’hui devant le novillo qui était d’ailleurs presque un toro. Tibo a montré toute son envie, sa détermination et ses qualités de torero. Tout ça me rassure un petit peu pour le reste de la temporada. Malheureusement pour Tibo je ne suis pas un apoderado qui a beaucoup de force, je n’ai pas d’arène, je ne suis pas ganadero. Rentrer dans des échanges c’est très compliqué. C’est Tibo qui a la solution. Il n’y a que lui qui peut faire avancer les choses en triomphant, en montrant ses qualités, en montrant son envie, sa progression et à partir de là on va pouvoir se battre. Il y a certaines grandes arènes qui nous attendent et tout va se décider entre Samadet et Arles. J’ai des contacts mais les empresas attendent les résultats. Et puis les promesses rendent les enfants heureux, alors restons prudents … Tibo l’an dernier a eu neuf novilladas. Il est sorti pas mal de fois a hombros, mais on a calculé que s’il avait mis les épées, sur neuf novilladas, il sortait sept fois a hombros. Il a affiché des possibilités énormes. C’est un garçon qui vit pour les toros, qui mange toros, qui dort toros, et même quand c’est dur il est toujours content. Il est parti en Espagne trois mois pour se préparer et je crois que ce qu’on a vu aujourd’hui, c’est l’aboutissement de tout ce travail. Vendredi on a eu un tentadero où il a montré un certain niveau, hier il a tué des toros chez Pascal Mailhan où on a vu qu’il avait progressé, et aujourd’hui c’était l’aboutissement. Je pense que cette année Tibo va faire parler de lui.
torobravo : l’an dernier, neuf novilladas. Combien en espérez-vous cette année ?
Serge Alméras : mon rêve ça serait d’en faire au moins le double. C’est peut-être utopique de ma part mais pourquoi pas. Il y a des portes en Espagne qui sont en train de s’ouvrir. Mais tout va dépendre de Tibo comme je le disais tout à l’heure. Pour le moment je ne veux pas trop en parler, je ne veux pas que ça me porte malheur. L’aboutissement ça serait de toréer à Madrid. Ce serait formidable si en août ou en septembre on pouvait aller à Las Ventas mais quand on va à Madrid, il faut être prêt pour pouvoir s’ouvrir encore d’autres portes.
torobravo : Madrid c’est donc le rêve final ?
Serge Alméras : oui, mais ça dépendra des résultats qu’aura eu Tibo. Si on va à Madrid, c’est pour ouvrir la Grande Porte.
torobravo : est-ce que vous envisagez l’alternative ou c’est prématuré ?
Serge Alméras : pour moi, c’est prématuré. Je prends les choses au jour le jour. Il faut voir l’évolution du torero, la progression. Maintenant on ne peut plus revenir en arrière. Il y a eu une époque où quand un novillero faisait vingt novilladas, il était en bas de l’escalafon. Maintenant celui qui fait trente novilladas, il est en tête. C’est un métier qui s’apprend et maintenant le public et les empresas sont de plus en plus exigeants. Il faut arriver hyper prêt parce que, quand on a pris l’alternative, on ne peut plus revenir en arrière. L’intérêt quand on prend l’alternative c’est ensuite de fonctionner en corridas de toros. C’est pas le tout de se faire plaisir un jour en prenant l’alternative à Arles, à Nîmes ou Dax avec des figuras, mais si ta carrière s’arrête ce jour-là, pour moi ça ne vaut pas la peine. Mieut vaut peut-être prendre l’alternative dans des arènes plus modestes avec un cartel fort pour pouvoir ensuite avancer et négocier avec des arènes plus importantes. Mais au stade où on en est maintenant je ne pense pas à l’alternative. Je veux voir comment va se dérouler la temporada. Après, sincèrement, on ne pense pas à une alternative en fin de saison.
torobravo : et l’Amérique du Sud, vous n’y avez jamais pensé ?
Serge Alméras : oui, bien sûr, on y pense tous les jours, mais à y aller dans de bonnes conditions. Aller en Amérique et que ça nous coûte de l’argent, on ne peut pas le faire. En Espagne, il y a des endroits où on aurait pu aller en payant mais ça, avec Tibo, on n’a jamais voulu le faire. C’est vrai qu’il y a des endroits où on va aller avec Tibo, et si ça ne nous rapporte pas d’argent, ce qui est sût, c’est que ça ne coûtera rien à Tibo. La tauromachie, c’est quelque chose qui se mérite, et un torero qui a des qualités, un jour ou l’autre elles seront reconnues. Et un jour ou l’autre c’est eux qui nous appelleront. Pour le moment on fait la démarche d’appeler, mais Tibo, avec les qualités qu’il a, je suis sûr qu’un jour ou l’autre, c’est eux qui nous appelleront.
torobravo : as-tu un modèle de torero ? ou un modèle de carrière ?
Tibo Garcia : des modèles, j’en ai beaucoup. Je ne m’inspire pas d’un matador en particulier. Peut-être Talavante ou Manzanares, ou Jean-Baptiste après la saison qu’il vient de faire, ou Roca Rey qui est en train de bousculer tout le monde… Pour la carrière, Ponce pourquoi pas. Mais ma personnalité d’abord avec une tauromachie classique, celle que j’aime…
torobravo : merci à vous deux et suerte pour cette temporada qu’on suivra de près.
Propos recueillis le 12 mars 2017 à la ganaderia Barcelo par Paco.