Zaragoza. 11 octobre. Malchance sur la Miséricordia… Lopez Simon coupe une oreille.

unnamed-3Quatrième corrida de la feria du Pilar, arènes combles, couverture entrouverte, température tiède, deux heures trente de spectacle.

Six toros de Juan Pedro Domecq, tous bien présentés, de 606 à 536 kilos, tous deux piques prises pour certaines avec force et en poussant. Le deuxième a mis le cheval en difficulté. Toréables à la muleta pour ceux ne manifestant pas de faiblesse, deuxième, troisième et quatrième. La quatrième primé d’une vuelta al ruedo.

  • Enrique Ponce (vert et or), au premier, une entière et deux descabellos, silence ; au quatrième, trois pinchazos, une entière, avis, vuelta.
  • Cayetano (entre rouge et rose et azabache), au deuxième, deux pinchazos, une entière, salut et ovation ; au cinquième, un mete y saca, un pinchazo, une entièren deux descabellos.
  • Alberto Lopez Simon (rose et or), au troisième, une entière, une oreille ; au dernier, une entière, un quart de lame, avis, trois-quarts de lame un descabello, silence.

A croire que la malchance la plus épaisse et la plus pénétrante s’est abattue mardi sur les arènes de Zaragoza. Les deux plus belles faenas signées successivement par Cayetano Rivera et Enrique Ponce, deux monuments de la tauromachie, deux sommets de l’art taurin, ont sombré dans une débauche d’acier. Un salut et une vuelta pour ce qui méritait largement deux oreilles.

unnamed-4Enrique Ponce avait commencé avec un de ces animaux que les Espagnols se plaisent à qualifier «d’infumable»… Infumable a faire tousser une armée en campagne ! Rien à dire de ce faible, épuisé dès la cape, achevé par la première pique. Il aura fallu toute la science d’Enrique pour lui arracher une ou deux passes.

Mais l’histoire changea d’âme avec un certain « Fabricante », colorado et ojo de perdiz qui allait revenir sans cesse dans la muleta… sous les yeux d’un public ravi et d’une cuadrilla heureuse pour le maestro qui venait de leur brinder ce combat… Probablement la dernière sortie de la saison. Très vite le corps totalement relâché, comme seul il sait le faire, Ponce, avec une nonchalance voulue, écrivit de longues séries de naturelles avec la muleta qui caressait le sable. Son plaisir, commencé sur la droite et par un subtil changement de main, allait se découvrir sur la gauche. A chaque passe on avait l’impression qu’il était un peu plus grand, un peu plus artiste. Un sommet tauromachique qui déclenchait, dans les tendidos, des tonneres d’applaudissements et des olés venus du plus profond des âmes. Certains réclamaient un indulto, non mérité car Enrique Ponce avait fait beaucoup pour fabriquer ce toro. Une vuelta suffisait après cet immense moment.

unnamed-1Avec Cayetano cela n’avait pas été la rigueur du Maestro de Chiva. Mais la volonté de se battre avec ces «pinceladas» artistiques fleurissant à tout moment. Tout avait commencé par une porta gayola précédant un série de véroniques stupéfiantes de courage et de bon goût, faisant lever toute l’arène. Il ouvrait la faena à genoux, du délire sur les tendidos puis il templait de fort belles séries sur la main gauche avec beaucoup de lenteur et d’harmonie. Par instant le rythme d’une symphonie…

unnamedMais ce furent les fausses notes de l’épée qui soulevèrent d’immenses regrets qui s’échappaient de l’immense ferveur qui accompagna son salut. Il ne trouva pas, par la suite, un rythme identique, ni un toro aussi collaborateur… Un animal faible qui revenait à contrecoeur et auquel il fut obligé d’arracher les derniers muletazos… Mais quelle élégance et quelle classe il avait démonté capote en mains.

unnamed-2Alberto Lopez Simon, malgré le trophée qu’il a gagné, paraissait bien terne entre ces deux géants. Avec le premier, trop rapide à la cape et souvent accroché. C’est sur une longue série de naturelles très lentes et merveilleusement templées qu’il se mettra en valeur. Par la suite il se garda bien de forcer son talent capote en main. On retiendra une belle ouverture de faena, quelques séries intéressantes mais jamais sans grande intensité et un desplante très pueblerino dans une arène de première catégorie. Alberto nous avait habitué à beaucoup mieux.

On parlera, longtemps encore, de ces deux faenas de Cayetano et Enrique Ponce.

Reseña et photos : Jean-Michel Dussol.

Reportage photos : Joël Buravand.