Drôle de titre me direz-vous ! Le solo de Castella m’a fait penser à l’histoire du verre rempli à moitié. Certains le verront à moitié plein, d’autres à moitié vide. Ainsi en est-il de la corrida d’hier après-midi: demi-succès ou demi-échec ?
Sébastien Castella n’a pas dû sortir des arènes de Nîmes comme il l’aurait souhaité, c’est-à-dire a hombros. Deux oreilles coupées à des toros d’Adolfo Martin qu’on aurait espéré de plus de présence, des moments magiques où la muleta du biterrois arrêta les pendules, des lidias millimétrées où chaque capotazo, chaque muletazo semblait calculé pour coller au plus juste aux conditions des toros. Bref, techniquement, le sans-fautes. Mais pour que la mayonnaise prenne, il manqua un élément qui fait la différence : l’émotion. Et on sortit des arènes avec un sentiment d’inachevé, pas vraiment déçus, pas vraiment ravis.
Sébastien accueillit son premier par véroniques et demie, finissant désarmé avant de le faire piquer légèrement par deux fois. Ce toro faiblard ne permit guère au biterrois, s’arrêtant en cours de passe après deux ou trois séries ambidextres de correcte facture où le bicho afficha plus de parcours sur la corne droite. Demi-lame en place après pinchazo, deux descabellos. Silence pour le piéton et sifflets à l’arrastre.
Reçu à l’identique du premier, le second prit deux rations de fer, traserita la première, version light la suivante. Après deux belles paires de banderilles de Marco Leal (appelé à saluer), Sébastien brinda ce second toro à l’artiste peintre et sculpteur Fernando Botero. Le bicho fit l’avion dans la muleta de Sébastien, manifestant beaucoup de noblesse sur les deux cornes, au point que le torero nous régala de deux naturelles d’éternité où le temps sembla s’arrêter. A droite comme à gauche le biterrois s’appliqua à toréer au ralenti, mais il manqua un peu d’alegria au toro pour nous faire passer dans une autre dimension. Entière trasera, deux descabellos. Oreille.
Le troisième Adolfo sauta au callejon dès son entrée en piste. Castella le remit dans le droit chemin par quelques véroniques et demie avant deux piques « pompées ». Brindée à Palomo Linares, cette troisième faena fut d’inégale intensité, le bicho se retournant vite par moments et désarmant le torero en marchant sur la muleta. A droite les muletazos furent longs et templés, à gauche plus secs, d’où un manque de fluidité de l’ensemble. Entière trasera après pinchazo. Salut au tiers.
Le quatrième colla au capote avant un tercio de piques bien mené par Gabin Rehabi en trois rencontres adroites, fer très bien posé sur l’animal, la troisième rencontre devant le palco avec l’Adolfo chargeant du centre du ruedo. Musique et picador applaudi à sa sortie. Suivirent deux bonnes paires de banderilles de Morenito d’Arles appelé lui aussi à saluer. La faena débutée sur la corne droite vit l’animal sur le point de bousculer le biterrois sur un extraño. Sébastien changea de main mais l’animal lui vint dessus sur les premières naturelles. Retour sur la corne droite où le garçon corrigea les défauts de l’Adolfo, parvenant à lui tirer quelques belles tandas templées. Entière traserita, descabello. Salut au tiers.
Le quinto s’avéra un adversaire de qualité. Sébastien le salua par bonnes véroniques et demie, puis le fit piquer par deux fois. Chargeant museau au ras du sol, avec une tendance tobillera (visant les chevilles), il fut très bien capté par la muleta du biterrois qui l’invita à une bonne faena, majoritairement droitière, qui fut primée d’un pavillon après une demi-lame tendida.
Le sixième était un manso qui fuit le cheval à plusieurs reprises après avoir senti la morsure du fer. Une fois de plus Castella s’imposa et parvint à construire une faena ambidextre dont se détachèrent deux naturelles au temple souverain. Bon travail du torero qui pincha une nouvelle fois avant de loger un tiers de lame qu’il dut compléter d’un descabello. Palmas.
Reseña et photos : Paco.