Santoña. 8 septembre (tarde). Clemente blessé… Cayetano et Garrido sortent en triomphe.

Santoña (Cantabrique). Très belle entrée dans les plus belle arènes du nord. Temps couvert et parfois frais, deux heures trente de spectacle pour la corrida de la Virgen del Puerto.

Trois toros du Puerto de San Lorenzo (1er, 2e et 6e) et trois de La Ventana del Puerto (3e, 4e et 5e), tous bien présentés, plutôt lourd, les Ventana un peu faibles. Tous une pique à l’exception du premier et du dernier, deux châtiments. A la muleta, parfois piquant mais toujours toréables et souvent nobles.

  • Cayetano Ordoñez (rioja de l’année et azabache), au premier, une entière, une oreille ; au quatrième, une entière, un descabello, une oreille ; au dernier, tué en remplacement de Clemente, une entière, silence.
  • José Garrido (rouge et or), au deuxième, une entière, deux oreille ; au cinquième, une entière al encuentro, une oreille.
  • Clemente (violet et or), au troisième, deux pinchazos, une entière, cogido, salut et infirmerie.

Ce ne sont pas deux, mais trois toreros que l’on aurait dû voir sortir en triomphe des arènes de Santoña… Mais l’épée et la malchance ont écarté Clemente,  auteur d’une merveilleuse faena et qui a terminé sa journée à l’hôpital de Santander. Clemente, entre deux grosses personnalités de la tauromachie, Cayetano Ordoñez et José Garrido, ne s’est pas laissé impressionner un seul instant. A la cape il fut excellent avec d’amples et lentes véroniques. Déjà Clément Dubecq séduisait les aficionados espagnols. Mais à la muleta il les a fait chavirer. Un toreo séduisant, complet, avec toujours beaucoup de temple et de lenteur, indifféremment sur une main ou  l’autre. Il inventait même quelques figures suicidaires pour se tirer de mauvais pas. Un garçon parfait débordant de personnalité… Le nouveau torero français que les aficionados attendent. Mais il doit encore apprendre à tuer. Visiblement mal à l’aise dans cette suerte, après deux tentatives, il se jette sur les cornes. L’épée rentre presque jusqu’à la garde, mais Clemente est lancé par les cornes avant de retomber durement…Courageusement, le visage déformé par la douleur, il attend, et salue sous les cris de « torero… torero » et part pour l’infirmerie. Quelques minutes plus tard, il sera transporté à Santander avec une plaie au niveau de l’aisselle gauche et un puntazo au dessus du genou droit.

Cayetano a apporté un grand souffle artistique sur l’arène. Si chaque fois il fut bref à la cape, de ses rares capotazos émanait une harmonie et une beauté étrange. Pour sa première sortie, merveilleuses passes de châtiment, très bien dessinées et d’un esthétisme parfait. S’étant transporté sur la main gauche, il s’y faisait admirer royalement et longuement pour son plaisir et surtout le nôtre. Par la suite il semble inventer un degré supplémentaire à sa lenteur naturelle. Chaque muletazo semble être décortiqué, décomposé pour mieux l’apprécier…Un rêve merveilleux passe.

Dans son rôle de chef de lidia il tue le dernier toro… La folie semble avoir saisi l’arène qui se livre à de gigantesques « olas », chante, crie, plaisante et n’a plus la tête à la piste. Devant tant de désinvolture, l’Andalou ne fait pas traîner les choses. Dommage il avait peut-être envie de nous régaler une troisième fois.

José Garrido, se livrera entier lors de son premier combat… Cinq véroniques d’ouverture, comme il n’en existe que dans les rêves. Il enchaîne par quelques sortilèges à la muleta avant d’ouvrir un registre d’un classicisme d’école. On comprend vite que sur la main gauche le torero comble son bonheur. Un grand moment de plaisir. Cette main il la conservera longtemps, avant de baisser de niveau dans des figures « pueblerinas ». Mais le public exulte. Hormis la cape, sa deuxième sortie est bien en-dessous. Même s’il domine à gauche, il n’égale pas la profondeur de sa précédente faena.

Une course très agréable où l’on regrettera longtemps le contretemps de Clemente. La tradition fut respectée et chaque torero ayant obtenu un trophée a été récompensé, par les pêcheurs, d’un splendide thon.

Reseña et photos : Jean-Michel Dussol.