Il était attendu à chacune de ses sorties, et souvent, comme pour un certain Curro Romero, les fans devaient se contenter de détails, certes précieux, mais laissant beaucoup sur leur faim.
Seconde sortie consécutive pour les toros de Nuñez del Cuvillo que l’on considèrera avec les réserves d’usage, point n’est besoin de répéter les remarques précédemment écrites au fil d’autres comptes-rendus. Des bichos donc maniables mais sans grand fond, faire-valoir indispensables de nos figuras.
On pouvait sentir qu’il allait se passer quelque chose dès l’entrée du premier toro car Morante ouvrit son capote pour dessiner des véroniques maison, mains basses, en guise d’apéritif. Mais le plat de résistance n’allait pas être servi avec ce premier Cuvillo, Morante de trouvant pas l’accord avec cet adversaire noble mais manquant de moteur. Quelques bons muletazos et un mauvais final avec l’épée, et le premier trasteo du torero de La Puebla s’achevait en silence.
La magie du toreo du garçon se manifesta face au quatrième, un autre toro abordable que Morante sut capter d’emblée dans les plis de ses étoffes, se laissant aller à son inspiration pour dessiner ce qui restera l’une des meilleures faenas de ces dernières temporadas. L’oeuvre dans ces cas-là est indescriptible au sens strict du terme, pour l’apprécier il faut la vivre dans la magie de l’instant. Bien rématée par une bonne lame, la composition fut créditée de deux oreilles dans l’ambiance qu’on imagine.
El Juli, dans un registre différent, joua aussi sa carte, d’abord lors de son premier combat où il alterna au quite avec Roca Rey, le madrilène par chicuelinas et demie, le péruvien par caleserinas et tafalleras. Mais le Cuvillo manqua de moteur au dernier tiers, et si Julian se montra très au-dessus de son opposant, il ne put jamais passer la vitesse supérieure pour rouler vers le succès. Salut après une lame trasera. A noter que ce second toro renversa le cheval monté par Diego Ortiz, infligeant au passage une cornada à l’équidé.
El Juli rencontra ensuite un second bicho sans transmission aucune, et il lui incomba de tout faire pour dépasser cette médiocrité, désirant à tout prix éviter de repartir les mains vides. Il foula donc des terrains compromis au prix d’une voltereta, recevant au passage une cornada de 15 cm dans la fesse droite. Il resta en piste et continua son trasteo mais le manque de réussite à l’épée le priva du trophée convoité. Salut avant de passer à l’infirmerie.
Roca Rey avait affaire ce jour à forte partie. C’est de rodillas qu’il accueillit donc le troisième avant de se montrer ensuite varié au capote, puis sûr de lui et autoritaire avec la muleta, son trasteo contrarié par de fortes rafales de vent qui le cantonnèrent près des planches. Le garçon fit le maximum, parvenant à tirer de l’animal tout ce qui était possible, se passant le bicho à la ceinture avec déjà un certain métier. Oreille malgré une lame latérale.
Le dernier Cuvillo dura bien peu, et le péruvien dut jouer dans les terrains de proximité pour en tirer le maximum. Hélas au final la rapière lui fit perdre le bénéfice de ses efforts. Salut.
(Photos : Joël Buravand)