Aire sur l’Adour. 21 juin. Des Fraile compliqués.

 

Capture d’écran 2015-06-22 à 06.41.25Une belle entrée pour cette arène. Soleil, chaleur et mouches, temps parfait pour la corrida. Plus de deux heures trente de spectacle.

Six toros de Juan Luis Fraile, bien présentés, armures totalement dans le type graciliano, compliqués à souhait… mais rappelant les monstres qu’élevaient le papa de la ganadera. De deux à quatre piques pour le cinquième, difficiles par la suite, mais levant par instant le voile de la corrida à l’ancienne.

  • Rafaelillo (bleu pétard et or), silence et silence.
  • Morenito de Aranda (bleu sinistre et or), applaudissements et une oreille.
  • Mehdi Savalli (mauve mais pas guimauve et or) silence et silence.

Dans le retour des Juan Luis Fraile y Martin à Aire-sur-l’Adour, il y a eu, hier, dimanche 21 juin, de nombreuse choses encourageantes. Dans leurs proportions et leurs armures on a retrouvé ces toros qui nous faisaient rêver, mais avec 80 ou 100 kilos de moins, des cornes un peu moins développées, l’émotion ne pouvait pas monter dans les tendidos… Mais dans leur complexité, leurs difficultés et leur dangerosité, les toros de Juan Luis sont toujours les siens. Alors à Aire ce fut une course compliquée, pas très brillante et souvent un enfer pour les toreros.

Sur les six toros, tout s’est joué sur un tout petit terrain, guère plus de 25 mètres carrés, où l’animal consentait à répéter, à avancer, gardant pour lui cette fâcheuse tendance à jouer de la corne, de la tête, histoire d’harponner l’homme. Très souvent de vils spadassins, mais un toro un peu à l’ancienne, comme on les aime lorsqu’on recherche une certaine idée de la corrida…

Les trois toreros, des grands des courageux dont les efforts n’ont pas toujours été compris par le public.

Capture d’écran 2015-06-22 à 06.41.39Rafaelillo, dont on aurait pu s’attendre à le voir expédier les affaires courantes, est demeuré, chaque fois, très présent, tentant de mettre en valeur les Juan Luis Fraile… et ce « Cardino », andarin à souhait, fuyant par moments, tous les défaut réunis en un même animal. Il fallait oser s’y mettre devant. Il n’avait rien pu prouver à la cape. A la muleta ce fut ce combat de l’impossible, un sale jeu de la vie et de la mort qui se terminera assez vite. Difficile de comprendre tous les efforts déployés.

Capture d’écran 2015-06-22 à 06.40.48Mehdi Savalli a démontré une belle maturité et une volonté de convaincre. Du courage, le garçon en a fait preuve lors de ses deux sorties. Parfait pour terminer la course, risquant à tout moment l’accident avec un assassin au yeux doux mais terrible dans son jeu de cornes. Mehdi était au dessus. Cette deuxième faena méritait beaucoup plus qu’un silence affligeant. Il avait bandérillé, était monté en permanence sur les cornes, avait évité les cornes qui lui cherchait les chevilles… Mehdi a prouvé qu’on devrait l’intégrer plus souvent dans les cartels. Ce ne fut pas le brillant et le clinquant de l’an passé… mais une belle leçon de courage et de tauromachie.

Capture d’écran 2015-06-22 à 06.41.06Le petit prince de la journée, Morenito de Aranda ! L’épée lui fait perdre une oreille face à son premier toro. Certes il se rattrapera ensuite. Mais Morenito est un cas unique en tauromachie, aussi à l’aise devant des Domecq que les Fraile d’Aire. Un grand technicien, qui sait allier l’élégance à sa grande connaissance du toro… Un maître que l’on ne voit que trop rarement. Dimanche, conquérir le public d’Aire n’était pas chose facile. Morenito l’a fait parce qu’en réveillant son second toro, l’obligeant à charger et à revenir sur le drap, il en a profité pour signer une grande série, rematée par un pecho. Un moment qui a fait l’essentiel de sa faena. Il peut être fier de cette oreille arrachée à un Fraile.

Ce fut une course sérieuse, compliquée, des moments où les Fraile ont retrouvé une part de leur lustre d’antan. Encore un peu de sélection et le gabarrit d’autrefois, l’élevage est sur la bonne route. Avec beaucoup d’illusion la commission taurine d’Aire a fait confiance à cette ganaderia… Ils n’ont pas à le regretter surtout lorsqu’on met en piste six toros qui terminent bouche fermée, qui reviennent plusieurs fois sous le fer et qui, dans leur prestance, arborent clairement leur origine Santa Coloma Graciliano. Ce fut difficile, mais on n’a pas à regretter cette belle après-midi.

Reseña et photos : Jean-Michel Dussol

Reportage photos : Romain Tastet