C’est devant un beau parterre d’aficionados (deux tiers d’arène) que les toros de feu Le Curé de Valverde (aujourd’hui propriété de Jean-Luc Couturier – voir article) ont fait leur retour en terre alésienne après quelques lustres d’absence.
Retour réussi avec six bichos de belle présentation, solides en 17 piques plus ou moins poussées, et arrivant au dernier tiers avec l’envie de vendre chèrement leur peau. Il y eut de l’intérêt et de l’émotion en piste, et c’est bien là l’essentiel en ces temps de douceurs inconsistantes délivrées par les ganaderias commerciales.Un petit regret : on aurait bien voulu savoir quels poids accusaient les toros sur la romaine.
Marc Serrano accueillit son premier par larga cambiada afarolada de rodillas au fil des planches, se relevant ensuite pour quelques véroniques où le bicho se retint un peu. Face au cheval, le Valverde s’employa peu sous le premier fer et se fit prier pour y revenir, les deux fois en cognant sans pousser. Initiée par une bonne série de la droite, la faena tourna vite au combat de rue, aucun des deux opposants ne voulant céder un pouce de terrain. L’essai à gauche s’avérant infructueux, c’est sur une corne droite volontiers accrocheuse que se déroula l’essentiel du travail en quelques tandas volontaires conclues par demi-lame verticale après pinchazo complétée par six descabellos. Arrastre applaudi et salut au tiers.
Le quatrième, un bizco aux cornes effilées, se comporta à l’identique du premier dans la capote du nîmois où il freina. Marc parvint à lui extorquer quelques véroniques et une demie avant de le conduire vers le picador qui le piqua deux fois dans un mauvais style (carioca et fer en arrière). Le Valverde arriva au dernier tiers sans une passe, compliquant la tâche du garçon qui le doubla très bien par le bas avant de tenter des muletazos ambidextres sans parvenir à allonger la charge du mauvais coucheur. Entière contraire, deux descabellos. Vuelta.
Alberto Alvarez fut une découverte pour beaucoup d’aficionados. Il accueillit le second par quelques capotazos corects, le bicho comme ses frères ne se livrant pas dans l’étoffe, puis le mena vers son picador pour une première ration de fer où il poussa par à-coups et s’alluma, revenant dans le peto pour une seconde ration trasera. Bien doublé en début de faena, le toro se laissa embarquer dans de bonnes séries ambidextres où le torero sut courir la main pour accompagner les charges vives d’un animal qui jouait des cornes de temps en temps. Trois-quart contraire, trois descabellos. Salut au tiers.
Le quinto fut reçu par bonnes véroniques et demie, puis cogna dans le matelas lors de la première rencontre, y revint une seconde fois pour une courte ration de fer, rechargea sans être piqué puis enfin sortit seul du dernier passage dans le peto. Bonne série de derechazos pour initier la faena, puis des séries droitières où la difficulté alla croissant, le Valverde se faisant de plus en plus prier pour collaborer. Faena de mas a menos conclue d’un estoconazo foudroyant au troisième assaut et oreille un peu généreuse.
Alberto Lamelas tomba sur un premier adversaire plus violent que brave qui ne se livra pas dans le capote, qui s’enfuit ensuite sous la première morsure du fer, revenant ensuite vers le cavalier pour deux piques, la première des deux prise en poussant. Le bicho, qui répétait avec violence, fut peu à peu canalisé par le torero qui pesa sur lui, imposant des muletazos ambidextres au tracé souvent brouillon. Final par manoletinas serrées, puis des complications avec les aciers (un tiers tendida, deux pinchazos, demi-lame caida et deux descabellos). Palmas et arrastre applaudi.
Le sixième était une véritable estampe et s’avéra le meilleur de la course. RAS au capote puis un bicho qui expulse le picador de sa selle à la première rencontre mouvementée, revenant ensuite dans le matelas pour deux piques prises en poussant avec bravoure et fixité. Quite de Marc Serrano par deux véroniques et demie. Hélas au dernier tiers Lamelas nous servit des passes au kilomètre. Au spectateur de trier le bon grain (il y en eut) de l’ivraie. Bref un toro de classe qui, en d’autres mains, aurait pu avoir un meilleur destin (voire avec une lidia appropriée retrouver son campo).
Pris lors de l’estocade (lame dans le flanc), le torero fut emporté vers l’infirmerie où l’on constata une cornada à l’aine avec deux trajectoires de 15 et 20 cm, ainsi qu’un coup de corne au cou de 5 cm (Photo : Yves Porras). Marc Serrano descabella le bicho qui fut honoré de la vuelta posthume. Oreille pour Lamelas dont on doute fort qu’il puisse être à Vic la semaine prochaine.
Salut du mayoral à l’issue de la course.
Reseña et photos : Paco.