Saint Martin de Crau. 29 avril. Toros de Cebada Gago.

Le soleil était revenu sur Saint Martin de Crau après les fortes pluies de la nuit, peu de vent, à part quelques rafales passagères qui gênèrent par moments les toreros, et surtout en piste des toros, des vrais, cinq nés entre décembre 2006 et avril 2007, le benjamin sorti en 4ème position né lui en septembre 2007. Un lot homogène en poids : de 530 à 560 kg. Et surtout 21 piques à afficher au compteur dont la plupart assez appuyées. Tous furent solides, si on excepte quelques génuflexions dues au traitement infligé au premier tiers. Bref, de quoi réjouir les aficionados présents, beaucoup moins les toreros dont deux furent en dessous du seuil de flottaison, quand ils ne coulèrent pas complètement. Un naufrage dont la voltereta subie par le chef de lidia n’est sûrement pas étrangère. Voyons ceci par le détail.

Sergio Aguilar se montra d’entrée sûr de lui en recevant le premier par élégants delantales et rebolera. Le bicho mit ensuite les reins lors des deux premières, un peu moins sur la troisième, le tout en partant de plus en plus loin. Doublant bien en début de faena, Aguilar poursuivit par deux bonnes séries de derechazos avant de se faire accrocher par le Cebada qui l’envoya au sol où il chercha à l’encorner. Plus de peur que de mal, sauf pour la taleguilla du torero. Sergio tenta ensuite d’arracher quelques muletazos mais l’animal qui avait tout compris lui vint dessus à chaque reprise. Aguilar s’en débarassa d’une entière caidita. Silence.

C’en était fini pour Aguilar. RAS au capote pour la réception du quatrième, des désarmés pour les mises en suerte au cheval, six rencontres dans tous les sens avec la cavalerie dont certaines assassines, la dernière après la sonnerie. Bref, panique à bord ! Muleta en main, le principal soucis d’Aguilar fut d’esquiver les charges du Cebada en reculant. Mort de peur, il prit presque instantanément l’épée de muerte et tenta de l’enfoncer à quatre reprises pour autant de pinchazos avant d’en finir d’un descabello à toro vif. Grosse bronca pour le torero et arrastre applaudi.

Tomasito fut le seul durant cette tarde à faire un effort. Il accueillit très bien son premier qu’il fixa dans le capote avant de lui servir d’estimables véroniques. Au cheval, le bicho mit les reins dans les deux premières longues rencontres, puis cogna sans pousser lors de la troisième, le picador posant chaque fois le fer à l’endroit adéquat (ça mérite d’être signalé car ça n’est pas souvent le cas). Bon quite de Thomas par chicuelinas et demie. Initiée par deux passes cambiadas au centre, la faena prit corps sur les premières séries droitières, le vent gênant un peu la manoeuvre. Le passage à gauche se fit prudemment, puis s’étoffa au fil des séries. Averti deux fois en fin de faena, l’arlésien clôtura son travail par trois manoletinas avant de loger une entière tendida. Oreille méritée après usage unique du descabello.

La réception du quinto ne fut pas des plus aisées, le bicho se montrant violent dans le capote. Il rémata tout aussi cviolemment contre les barrières où il se cassa l’extrémité du piton gauche. Trois bonnes piques sans grand engagement, puis un second tiers bien exécuté par Morenito d’Arles et José Gomez appelés à saluer après de bonnes paires de banderilles. Doublant bien en début de faena, Thomas se fit rapidement déborder par la charge vive du Cebada qui le désarma. L’arlésien tenta de reprendre le dessus mais la partie de gagne-terrain tourna à l’avantage de l’animal, malgré quelques valeureuses séquences droitières. Le travail sur le piton gauche fut plus marginal, le bicho se retournant très vite et obligeant le garçon à garder une distance de sécurité. Entière tendida pour conclure et oreille un peu généreuse, le torero n’ayant pu asseoir sa domination sur son adversaire. Une bonne partie du public contesta l’octroi du trophée et le fit savoir. Mieux vaut souvent une vuelta fêtée qu’une oreille contestée (bien que pour le coup le torero n’y soit pour rien).

Esau Fernandez, triomphateur ici même en novillada il y a quelques années (il avait gracié un Tardieu), ne fut pas à la hauteur de la tâche, et c’est peu dire. Il reçut correctement le troisième par véroniques, chicuelina et demie puis le mena au cheval pour trois piques relativement légères (ce fut l’animal le moins piqué). Muleta en mains, le garçon entama sur la corne droite par derechazos sans grand intérêt, tenta la corne gauche sans plus de succès, l’ensemble totalement fuera de cacho. Loin d’améliorer son opposant, il lui donna des défauts. Impuissant face à la caste vive du Cebada, Fernandez s’en débarassa d’une trois-quart caida. Silence.

Face au sixième, ce fut le naufrage. Absent au capote, Esau laissa son banderillero mener le bicho au picador où l’animal poussa bien lors des deux premières rencontres, faisant reculer la pièce montée sur un quart du ruedo. Le Cebada revint au cheval une troisième fois avec moins de conviction. L’animal durement châtié garda suffisamment de moral pour effrayer Esau Fernandez qui prit l’épée de mort après trois coups de chiffon. L’espagnol pincha six fois sans jamais s’engager dans l’ambiance qu’on imagine, laissa au septième essai un pinchazo hondo avant d’en finir de deux coups de descabello. Grosse bronca pour le garçon.

Les deux espagnols sortirent sous les huées du public. Tomasito, bien que crédité de deux trophées, refusa la sortie a hombros et quitta la place sous des applaudissements.

Paco.