La saga des Bienvenida (4).

Biographie de Manuel Mejias y Jimenez « Bienvenida IV ».

Manuel Mejias y Jiménez appelé Manolito puis Manolo Bienvenida, Bienvenida IV.

 » El nacimiento de un niño prodigio que será una figura del toreo » (La naissance d’un enfant prodige qui sera une figure du toreo)

Comme indiqué précédemment, Manuel Mejias Jiménez vit le jour à Dos Hermanos (Sevilla) le 23 novembre 1912.

La montée en puissance.

Dès son jeune âge, Manuel est promis à une carrière de torero, de par son grand-père banderillero, son oncle José, mais surtout son père portant aussi le prénom de Manuel, et qui avait alors 28 ans lorsque le petit Manolo est né.

Manuel père ou Le pape noir avait pris l’alternative le 4 octobre 1905, soit 7 ans avant l’arrivée de son fils ainé. Lorsque ce dernier se doctora le 30 juin1929 (à 16 ans), El Papa Negro n’avait que 45 ans (un bien jeune retraité, puisque sa despedida remontait au 9 septembre 1924 dans les arènes de Bélmez près de Cordoue, et ceci devant des toros de Pérez de la Concha, ganaderia fondée par la famille Concha y Sierra).

A Madrid le 7 janvier 1914 naissait José, le second fils, beaucoup plus connu sous l’apodo de Pepe, et ce n’est qu’avec 13 mois et 15 jours de différence que les deux garçons feront ensemble leurs premières armes sous la dure férule du père, se présentant à la Maestranza de Séville le 28 août 1925. Manuel n’avait pas encore 13 ans, et José à peine plus de 12 ans et demi. Le duo de becceristas sillonna l’Espagne, la France et l’Amérique, et plus particulièrement le Mexique. Après trois temporadas d’aspirants toreros aux quatre coins de la Planète des Toros (et surtout au Mexique, où l’âge importe peu), les deux frères Mejias foulent enfin, le 8 septembre 1928, le sable de la Monumental de Madrid, avec la fine complicité d’un certain Edouard Pagès, très connu dans le mundillo de l’époque.

N’ayant pas encore atteint les 16 ans révolus, considérés donc encore mineurs pour une prise d’alternative, Manuel et José repartirent outre-Atlantique, avec cette fois le troisième frère, Rafael dit Rafi.

En 1929, à 17 ans, Manolo se risqua en novillada piquée. Il combattit même seul six novillos dans les arènes de Lima (Pérou).

L’alternative.

De retour en Espagne, Manuel prit enfin l’alternative le 30 juin 1929 à Zaragoza face à des toros d’Antonio Flores (de souche Veragua) avec pour parrain Antonio Márquez (1898/1988), le témoin moins connu étant Lagartito (ne pas confondre avec le grand Rafael Molina Sánchez dit Lagartijo). Manolo coupa un cartilage à Mahometaño, son bicho d’alternative. Même pas quatre mois après son doctorat, le 12 octobre 1929, Manuel confirmait à Madrid en un mano a mano très osé l’opposant au grand maestro Marcial Lalanda (1903/1990) face à des Alipio Pérez Tabernero. Sa saison européenne de matador compta un peu plus de trente  contrats. L’année suivante (1930), il se classa second derrière Marcial Lalanda (87 contrats). Le 5 octobre de la même année là, il s’enferma avec six Concha y Sierra à Valencia, sa meilleure corrida, dit-on.

Enfin numéro uno.

En 1931, Domingo Ortega prit la tête du peloton jusqu’en 1935 où Manolo termina en tête avec 64 corridas. Domingo reprit malgré tout sa place en 36 et 37.

1932 fut une bonne saison pour Manolo, mais courant 1933, lors d’une corrida à Madrid, il se fit prendre sérieusement dans le triangle de scarpa par un toro de Bernardo Escudero-Isc, une cornada qui l’obligea à interrompre sa temporada afin de soigner cette vilaine blessure. Après s’être refait une santé, il honora bon nombre de contrats jusqu’à ce qu’éclate la guerre civile espagnole en juillet 1936 qui vit la prise de pouvoir par le général Francisco Franco (1892/1975). Ce conflit majeur entraîna un extraordinaire ralentissement des spectacles taurins dans toute la péninsule Ibérique, et cela jusqu’en 1939.

Malgré cela, Manolo fut considéré durant toute cette période comme un des diestros parmi les plus inventifs et imaginatifs et ce malgré une autre cornada à Bilbao en juin qui le ralentit encore une fois. Comme indiqué précédemment, Manolo fut chahuté sévèrement par Domingo Ortega de 1930 à 1937 pour l’obtention des premières places.

La maladie et la mort d’une figura del toreo.

En juillet 1938, Manuel ressentit une certaine lassitude et un épuisement chronique. Cet abattement soudain l’incita à consulter un médecin qui établit le diagnostic suivant : kyste hydatique au bas des reins causé par un chien (cette maladie se développe le plus souvent dans le foie contenant des hydatides). Hospitalisé, cette tumeur lui fut retirée, mais peu de temps après, on découvrit un cancer au poumon qui entraîna sa mort. Ainsi, le 31 août 1938, Manolo disparaissait dans une clinique de San Sebastian. Il allait sur ses 26 ans.

José Maria de Cossio dit de lui : « Son toreo est allègre, élégant et varié, plein de grâce. Torero complet, le toreo n’avait pas de secrets pour lui, aussi bien dans sa connaissance de l’ennemi, que pour la technique et son exécution ».

Le fameux chroniqueur taurin, Néstor Luján, quant à lui, rajouta : « Comme artiste, il déploya un répertoire varié et exquis au capote, d’une fertilité inépuisable : sa véronique, avec un riche et épais déploiement de carmins, ses chicuelinas parfaites et vivaces, ses gaoneras impeccables, ses farols papillotants, son merveilleux toreo à la cape de face, mains en arrière, ses lumineuses serpentinas et reboleras. Manolo possédait une jeunesse irrésistible et pimpante, une vivacité bouillonnante toujours scellée avec un sourire triomphal, avec lequel il gagnait la sympathie des gradins ». (Toutes ces passes sont très détaillées dans livre achevé en 2010 et édité aux Editions Laccour-Olle de Nîmes).

Commentaires.

Bienvenida IV et Juan Belmonte

Le seul défaut qu’on pourrait reprocher à Bienvenida IV était une certaine hétérogénéité à l’épée due probablement à un manque d’assurance.

Armillita, le célèbre maestro mexicain (1911/1978), le madrilène Marcial Lalanda (1903/1990) et Manolo Bienvenida resteront comme les trois personnages clés de cette période dite « d’argent », piliers d’un authentique toreo qu’apporta un certain … Joselito.

Du fait de ses débuts très jeune dans le milieu taurin, mené par un père endurci par une enfance très difficile et très ferme envers ses fils, Manolo était devenu un maestro absolu, maître des toros autant que de lui-même, et ayant une connaissance parfaite des terrains.

Il demeurera à jamais l’une des étoiles de son temps, avec le cartel dit des quatre as comportant le valencien Vicente Barrera, le madrilène Marcial Lalanda et le torero de Tolède Domingo Ortega. On pourrait y rajouter un cinquième compagnon de route, l’aztèque Fermín Espinosa dit Armillita, surnommé le Joselito mexicain.